« Sortir des sentiers battus »
Olivier Peyronnet est un artiste plasticien villejuifois. Une rencontre fortuite avec Feli Barbera, art thérapeute, a permis à Olivier d’installer, depuis début février dernier, son atelier dans l’enceinte de l’hôpital Paul-Guiraud. Il résidera au sein de l’établissement durant l’année 2023.
Rédigé par Stéphanie Guimberteau, responsable éditoriale
Pourquoi avez-vous choisi Paul Guiraud ?
J’ai déjà réalisé en 2001 une exposition dans l’hôpital Sainte-Anne. Je garde toujours un lien avec mes expériences passées et de possibles développements… Je m’intéresse depuis quelque temps au psychiatre Edouard Toulouse, jadis interne à Villejuif, puis médecin chef. Il était intéressé par le milieu artistique de son époque, a écrit une étude sur les processus créatifs d’Émile Zola et a collaboré avec Antonin Artaud, devenu un temps son secrétaire. L’institution psychiatrique tentait alors de se réformer et il était en lien avec les mouvements les plus progressistes. Ce qui me stimule, c’est de sortir des espaces balisés pour l’art contemporain. Je préfère prospecter de nouveaux environnements qui ont du sens, une portée sociétale en lien avec ce qui me nourrit. Mon travail établit des passerelles avec les sciences, certains créateurs, des rapports sociaux imprévisibles, se nourrit de l’énergie des lieux, des jeux de l’esprit… Je peux même ajouter que je pourrai m’inscrire dans la lignée de l’«art brut » initié par Jean Dubuffet.
Quels sont les matériaux et les techniques que vous employez et pourquoi ?
Les matériaux que j’utilise ont une portée symbolique forte. Par exemple, l’objet filtre protéiforme me plaît beaucoup. On filtre l’eau, l’air, nos pensées aussi... Mes toiles sont des tamis… Elles sont imprégnées de substrats et il en reste des traces de passages, des taches, des mots, des phrases… Je préfère être à la racine du matériau et juste le rehausser en quelque sorte. Je travaille avec des filtres à café issus de ma consommation personnelle. Ils sont moulés sur un vrai filtre à café. Puis les couches de colle les rigidifient pour qu’ils puissent devenir éléments d’une installation. Un passage de vernis est ensuite posé dessus pour les pérenniser. J’aime récolter des matériaux déjà utilisés, recycler, assembler, créer avec des matériaux marqués par leur vie passée. Je travaille également avec des filtres de moteur de voitures, récupérés chez un garagiste. J’assemble ces modules concrets pour leur donner, si possible, une forme inédite d’évocation, un glissement vers un espace autre, poétique…
De quelle façon les patients et le personnel de l’hôpital découvriront vos réalisations ?
Dans un premier temps, des visites dans l’atelier sont prévues certains vendredis après-midi à partir du mois de mars afin d’établir un dialogue avec les patients et le personnel. Ainsi, des échanges vont s’opérer sur ma démarche, ce que j’aurai en cours de production. Et dans un second temps, en juin prochain, mes œuvres seront installées et exposées dans trois vitrines sous des coursives extérieures. Elles auront ensuite vocation à être mises à la disposition des prochains artistes qui seront à leur tour en résidence au sein de l’établissement.